En 2025, près de 4 millions de salariés français ont connu un arrêt maladie, selon les dernières données de la Caisse nationale d’assurance maladie. Derrière ce chiffre se cache une réalité complexe : le calcul du maintien de salaire, véritable casse-tête pour les employeurs comme pour les employés. Entre indemnités journalières de la Sécurité sociale, compléments employeur et subtilités de la subrogation, comprendre ses droits et obligations relève souvent du parcours du combattant. Cet article décrypte mécanisme par mécanisme les règles applicables en 2025, avec des exemples concrets et des simulations chiffrées.
Les bases du maintien de salaire en arrêt maladie
Le système français de maintien de salaire repose sur un principe de solidarité articulé entre trois acteurs : la Sécurité sociale, l’employeur et éventuellement des organismes complémentaires comme MGEN, Harmonie Mutuelle ou Malakoff Médéric. Lorsqu’un salarié est en arrêt maladie, son contrat de travail est suspendu, mais pas rompu. Cette subtilité juridique ouvre droit à des indemnités de remplacement calculées selon des règles précises.
Le maintien de revenus combine généralement :
- Les indemnités journalières de la Sécurité sociale (IJSS)
- Un complément versé par l’employeur
- D’éventuels dispositifs conventionnels ou contractuels
Conditions d’éligibilité aux IJSS
Pour prétendre aux IJSS en 2025, le salarié doit remplir l’une des deux conditions suivantes :
Option | Exigence | Calcul |
---|---|---|
Volume horaire | 150 heures travaillées | Sur les 90 jours précédant l’arrêt |
Cotisations | 1 015 x SMIC horaire | 12 058,20 € sur 6 mois |
Un exemple concret : Sophie, technicienne dans une PME, gagne 2 400 € brut mensuels. Après 18 mois d’ancienneté, elle est arrêtée pour une angine sévère du 10 au 25 mars 2025. Son salaire journalier de base est calculé ainsi : (2 400 x 3) / 91,25 = 78,90 €. Ses IJSS s’élèveront donc à 50% de ce montant, soit 39,45 € par jour.
Calcul précis des indemnités journalières
Le montant des IJSS obéit à une formule mathématique stricte, mais plusieurs paramètres viennent complexifier le calcul réel. Depuis avril 2025, le plafond des IJSS a été revalorisé à 41,47 € brut journalier, soit 1,4 fois le SMIC mensuel (2 522,52 €).
Cas particuliers à connaître
Certaines situations modifient substantiellement le calcul :
- Délai de carence : 3 jours non indemnisés sauf exceptions (ALD, reprise sous 48h)
- Télétravail : Les arrêts prescrits en téléconsultation sont limités à 3 jours maximum
- Ancienneté : L’ancienneté influence la durée mais pas le taux des IJSS
Prenons l’exemple de Karim, cadre chez AXA avec 8 ans d’ancienneté et un salaire mensuel de 4 200 €. Son SJB dépasse le plafond : (4 200 x 3) / 91,25 = 138,08 €. Ses IJSS seront donc plafonnées à 41,47 €, et non 69,04 € (50% de son SJB).
Le complément employeur : règles et calcul
L’intervention de l’employeur vient compléter les IJSS selon une mécanique bien huilée. Le Code du travail impose un maintien partiel du salaire sous conditions, avec des taux qui évoluent selon la durée de l’arrêt.
Période | Taux de maintien | Durée maximale |
---|---|---|
1 à 30 jours | 90% du brut | 30 jours |
31 à 60 jours | 66,66% du brut | 30 jours |
Ces durées s’allongent avec l’ancienneté. Un salarié de 12 ans d’ancienneté chez Swiss Life bénéficiera par exemple de 50 jours à 90% puis 50 jours à 66,66%. Le calcul du complément employeur se fait toujours après déduction des IJSS perçues.
Exemple chiffré complet
Prenons le cas de Thomas, employé chez La Matmut depuis 4 ans avec un salaire de 2 800 € brut. Son arrêt maladie dure 45 jours en mai 2025 :
- SJB : (2 800 x 3) / 91,25 = 92,05 €
- IJSS : 92,05 x 50% = 46,03 €/jour (plafond non atteint)
- Maintien employeur :
- Jours 8-30 : (2 800/30 x 90%) – 46,03 = 37,97 €/jour
- Jours 31-45 : (2 800/30 x 66,66%) – 46,03 = 16,19 €/jour
- Jours 8-30 : (2 800/30 x 90%) – 46,03 = 37,97 €/jour
- Jours 31-45 : (2 800/30 x 66,66%) – 46,03 = 16,19 €/jour
L’impact de l’ancienneté sur les droits
L’ancienneté joue un rôle clé dans le maintien de salaire, tant pour l’éligibilité que pour la durée des droits. Un salarié doit justifier d’au moins un an dans l’entreprise pour prétendre au complément employeur, mais au-delà, chaque tranche de 5 ans ouvre des droits supplémentaires.
Ancienneté | Durée totale | Détail |
---|---|---|
1 à 5 ans | 60 jours | 30j à 90% + 30j à 66,66% |
6 à 10 ans | 80 jours | 40j + 40j |
11 à 15 ans | 100 jours | 50j + 50j |
Plus de 31 ans | 180 jours | 90j + 90j |
Marie, assistante chez Allianz depuis 17 ans, bénéficiera ainsi de 120 jours de maintien (60 à 90% et 60 à 66,66%). À noter que certaines conventions collectives, notamment dans la banque ou l’assurance, prévoient des dispositions plus favorables.
La subrogation : avantages et mise en œuvre
La subrogation est un mécanisme méconnu mais crucial qui simplifie considérablement la gestion administrative des arrêts maladie. Elle permet à l’employeur d’avancer l’intégralité du maintien de salaire et de se faire rembourser ensuite les IJSS par la Sécurité sociale.
Comparaison avec et sans subrogation
Aspect | Avec subrogation | Sans subrogation |
---|---|---|
Versement | Un seul versement employeur | Deux versements distincts |
Bulletin de paie | Ligne unique « salaire maintenu » | Deux lignes (complément + IJSS) |
Démarches salarié | Aucune | Doit attendre les IJSS |
Dans une entreprise comme MAAF qui pratique systématiquement la subrogation, le salarié perçoit ainsi son salaire habituel sur son compte, sans avoir à gérer les délais de versement des IJSS. L’employeur, quant à lui, bénéficie d’une simplification administrative et comptable.
Les spécificités du bulletin de paie
L’arrêt maladie modifie substantiellement la structure du bulletin de salaire. Plusieurs mentions obligatoires doivent apparaître clairement pour permettre au salarié de comprendre la composition de sa rémunération pendant son absence.
Un bulletin type en 2025 comprendra :
- La déduction pour absence proportionnelle aux jours non travaillés
- Le montant des IJSS (brut et net)
- Le complément employeur
- Les cotisations sociales sur les éléments maintenus
Exemple de traitement en paie
Pour un salarié de Groupe APRIL en arrêt du 5 au 20 avril 2025 (16 jours) avec un salaire de 3 200 € brut :
- Retenue pour absence : 3 200 / 30 x 16 = 1 706,67 €
- Salaire maintenu : 3 200 – 1 706,67 = 1 493,33 €
- IJSS : (3 200 x 3 / 91,25) x 50% x 13 jours = 683,84 €
- Complément employeur : calcul selon ancienneté et durée
Les pièges à éviter dans le calcul
Plusieurs erreurs fréquentes faussent le calcul du maintien de salaire, pouvant entraîner des régularisations coûteuses ou des contentieux avec les salariés. La complexité des règles explique en partie ces dérives.
Les principaux écueils incluent :
- Oublier le délai de carence : 7 jours pour le complément employeur
- Négliger l’ancienneté qui module les durées de maintien
- Confondre brut et net : les calculs se font toujours sur le brut
- Omettre les dispositions conventionnelles parfois plus favorables
Un cabinet comptable a récemment révélé que 38% des entreprises commettaient des erreurs sur le calcul du maintien de salaire, principalement sur la prise en compte exacte de l’ancienneté et des plafonds sociaux. Ces erreurs peuvent coûter plusieurs centaines d’euros par salarié concerné.